La science-fiction, un imaginaire utile à l’éthique de l’innovation: le cas du métavers

Thomas Michaud, Interfaces Numériques, 12(3), 2023

https://www.unilim.fr/interfaces-numeriques/5186

L’article explore l’influence de la science-fiction sur l’éthique du métavers. Il examine comment les œuvres de science-fiction, en présentant des futurs virtuels à la fois utopiques et dystopiques, alimentent les débats sur les implications morales et sociales de cette technologie. L’étude met en lumière les questions éthiques récurrentes dans ces récits, telles que les droits des avatars, le contrôle du monde virtuel, et les usages potentiels du métavers. L’auteur suggère que la science-fiction, bien que souvent critique, peut inspirer une conception plus inclusive et responsable du métavers. L’article propose également l’idée d’une IA chargée de faire respecter un code éthique au sein du métavers, afin de prévenir la violence et le harcèlement. En conclusion, l’éthique normative est souhaitable pour créer le métavers.

L’article explore le rôle de la science-fiction dans l’élaboration d’une éthique pour le métavers, soulignant comment les œuvres de fiction anticipent les enjeux moraux et sociaux liés aux technologies virtuelles et influencent les perceptions et les attitudes envers cette innovation.

Idées et faits clés :

• La science-fiction comme laboratoire éthique : L’auteur postule que la science-fiction ne se contente pas de prédire l’avenir technologique, mais qu’elle sert également de « paraspace » (Bukatman) où des questionnements éthiques émergent. Elle influence les représentations sociales de la réalité virtuelle et permet d’anticiper les dérives potentielles du métavers. « La science-fiction est un imaginaire utile à l’élaboration d’une éthique des technosciences et du numérique.« 
• Motifs récurrents et questions éthiques soulevées : L’analyse d’une quinzaine d’œuvres révèle des thèmes éthiques dominants :
• L’éthique de la vie artificielle (droits des avatars, créatures artificielles).
• La politique du métavers (contrôle du monde virtuel, légitimité de la résistance).
• Les usages du métavers (applications militaires, capitalistes, pédagogiques).
• La question de la violence, son acceptation et son impact dans les mondes virtuels.
• Les risques de dépendance et d’aliénation.
• Influence sur l’innovation et les perceptions : La science-fiction a un double impact : elle inspire les innovateurs en présentant des technologies imaginaires et en incitant à leur réalisation, mais elle peut également freiner l’innovation en soulevant des questions éthiques qui suscitent la méfiance et le rejet. « Elle constitue aussi un frein potentiel à l’innovation en posant des questions éthiques susceptibles de bloquer certaines recherches. » L’article suggère que la « négativité critique » des œuvres de science-fiction contribue à la prudence du public face au métavers, expliquant en partie la « hype » initiale suivie d’un désintérêt.
• L’éthique hacker comme modèle : L’article propose l’éthique hacker (horizontalité, passion, participation) comme alternative à l’éthique protestante (travail, compétition, propriété privée) pour guider le développement du métavers. « L’éthique hacker est présentée comme un socle de valeurs souhaitables pour l’élaboration de cette technologie.« 
• La question de la régulation et du contrôle éthique : L’auteur explore l’idée d’une IA chargée de contrôler les discours et les comportements dans le métavers, afin de garantir un environnement pacifié et conforme à un code moral préétabli. « Il apparait d’ores et déjà nécessaire de réguler moralement la création de contenus au sein du métavers. » Cette proposition suscite des interrogations quant à la liberté d’expression et au risque de censure.
• Nécessité d’une éthique normative : L’article conclut sur la nécessité d’une éthique normative pour le métavers, afin d’éviter les dérives liées au harcèlement, à la violence et au relativisme moral. La science-fiction, en anticipant les conséquences négatives d’une utilisation perverse de ces technologies, peut guider les créateurs vers un monde virtuel plus éthique et vertueux. « Une éthique du futur métavers doit donc être élaborée afin d’éviter que le relativisme moral mène à des comportements décadents ou violents au nom de l’expression d’une liberté radicale, voire excessive.« 

Citations clés :

• « La science-fiction est un imaginaire utile à l’élaboration d’une éthique des technosciences et du numérique. »
• « Elle constitue aussi un frein potentiel à l’innovation en posant des questions éthiques susceptibles de bloquer certaines recherches. »
• « L’éthique hacker est présentée comme un socle de valeurs souhaitables pour l’élaboration de cette technologie. »
• « Il apparait d’ores et déjà nécessaire de réguler moralement la création de contenus au sein du métavers. »
• « Une éthique du futur métavers doit donc être élaborée afin d’éviter que le relativisme moral mène à des comportements décadents ou violents au nom de l’expression d’une liberté radicale, voire excessive. »

Implications :

• Les créateurs et développeurs du métavers devraient prendre en compte les avertissements et les réflexions éthiques soulevées par la science-fiction.
• Une réflexion approfondie sur les valeurs morales à promouvoir dans le métavers est essentielle.
• La question de la régulation et du contrôle éthique doit être abordée avec prudence, en tenant compte de la liberté d’expression et des risques de censure.
• L’éthique hacker peut offrir une base intéressante pour un développement plus inclusif et équitable du métavers.

Conclusion :

L’article souligne l’importance cruciale de la science-fiction comme outil de réflexion et d’anticipation pour l’élaboration d’une éthique du métavers. En explorant les dangers potentiels et les questions morales liées aux technologies virtuelles, la science-fiction peut guider les créateurs et les utilisateurs vers un avenir numérique plus responsable et vertueux.