
Le livre La réalité virtuelle, de la science-fiction à l’innovation s’inscrit dans la continuité de recherches sur l’imaginaire des technologies de télécommunications. Une première partie s’intéresse à une cinquantaine de romans et de films de science-fiction qui ont pour la plupart atteint de statut de fictions cultes dans les secteurs de la réalité virtuelle et de l’informatique. Les œuvres les plus anciennes évoquant cette technologie datent des années 1950. Mais c’est dans les années 1980, avec le courant cyberpunk, que l’imaginaire de la réalité virtuelle est devenu le sujet de nombreuses histoires de science-fiction. Le livre montre l’évolution des représentations du virtuel en analysant des œuvres dont les plus récentes datent de 2017. Les lecteurs assidus pourraient craindre de retrouver les mêmes œuvres que celles étudiées dans le livre de 2008 Télécommunications et science-fiction, disponible gratuitement sur Google Books. Il n’en est rien. Dix ans après, le but était d’effectuer un nouvel état des lieux de cette thématique, en analysant des œuvres nouvelles ou inédites. On constate notamment l’émergence de nouveaux sujets de cette thématique. L’animation japonaise réactualise par exemple les fictions sur le virtuel en développant des récits dans lesquels les héros se trouvent prisonniers des simulations. Valerian aborde aussi les mutations du shopping à l’ère de la réalité virtuelle.
La mythologie du hacking et du piratage informatique est abordée différemment dans les œuvres américaines de William Gibson et dans la franchise japonaise Ghost in the shell. En France aussi, quelques fictions inspirées par les cyberpunks ont contribué à populariser le thème de la réalité virtuelle. C’est avec l’émergence d’Internet que la science-fiction virtualiste s’est popularisée et a réactualisé des mythologies pour générer un imaginaire global contribuant à structurer les représentations du futur des marchés.
L’analyse de cet imaginaire technique et de son impact sur l’innovation fut largement présentée dans mes précédents livres. Pourtant, de nouvelles conclusions sont développées ici à travers une théorie des technotypes, synthèse des termes technologie et archétypes. Le livre est très inspiré par les études sur les structures de l’imaginaire de Gilbert Durand, mais aussi par la psychologie de l’inconscient collectif de Jung et la théorie des monomythes de Joseph Campbell. La question de l’unité de l’imaginaire est notamment posée. D’où provient cet imaginaire tellement utile pour innover ? La théorie des technotypes montre de quelle manière émergent les technologies utopiques, révélant dans un processus à la fois individuel et collectif les desseins divins. Les technotypes sont probablement des matrices imaginaires propres à l’Humanité, qui doit par la technologie et l’innovation faire évoluer l’Humanité vers des perspectives que les prospectivistes ont l’ambition de découvrir.
La science-fiction a traité de multiples manières le sujet de la réalité virtuelle. Les étudier précisément permet de mieux comprendre comment l’imaginaire technique fonctionne, se structure et influence les innovateurs et les prospectivistes.