
Ant-Man, 2015
L’homme fourmi est un personnage des comics Marvel. Scott Lang sort de prison à laquelle il fut condamné pour cambriolage. Ne trouvant pas d’emploi, il finit par replonger dans la délinquance. Lors d’un de ses forfaits, il dérobe une combinaison permettant la miniaturisation du corps humain. Le docteur Hank Pym a découvert une formule basée sur la particule de Pym, qui varie la distance séparant les atomes, en augmentant leurs densités et leur force, ce qui permet de modifier la taille d’une personne. Pym refuse de travailler pour le SHILED et garde la formule pour lui, afin d’éviter un mauvais usage de son invention potentiellement criminelle si elle tombait entre de mauvaises mains. Le disciple de Pym, Cross, finit par trouver la formule de la miniaturisation et créer à son tour une armure, le Yellojacket qu’il envisage de vendre pour une fortune. Il faut le courage de Scott Lang, qui après un entrainement intensif parvient à manier l’art du combat et de la miniaturisation, pour vaincre Cross et devenir un superhéros, l’unique individu doté de ce pouvoir après l’explosion de la base de Cross. L’armée envisageait en effet de créer des escadrons de mini soldats, capable de jouer un rôle décisif dans les conflits du futur.
Comme souvent, les pouvoirs des superhéros attirent l’attention des militaires dans la fiction, et probablement aussi dans la réalité. L’armée américaine essaie par exemple depuis des années de créer l’armure d’Iron Man. La miniaturisation du corps humain est un thème récurrent dans la science-fiction. Le livre Destination cerveau, d’Isaac Asimov (1987), tiré du film Le voyage fantastique (1966) est devenu un classique du thème. Les Soviétiques sont parvenus à créer une technologie permettant de réduire le corps humain à la taille d’une molécule. L’histoire raconte le voyage dans un submersible miniaturisé de cinq personnes parties dans le cerveau d’un scientifique soviétique dans le coma détenteur des secrets permettant de rendre la miniaturisation abordable, alors qu’elle était jusqu’alors très coûteuse. Dans Downsizing (2017), le scientifique norvégien Jorgen Asbjornsen met au point le downsizing (réduction), qui réduit la taille des humains à 12 cm. Cette technologie doit permettre de lutter contre la surpopulation et d’assurer un mode de vie reposant sur la décroissance, les personnes volontaires à ce mode de vie pouvant vivre dans des cités sous cloches dans l’opulence à moindres frais. La comédie Chérie, j’ai rétréci les gosses (1989), mettait aussi en scène le fantasme de la miniaturisation du corps humain.
Les êtres miniatures et les géants se retrouvent dans les mythes et les légendes. On trouve dans la fiction les Liliputiens des Voyages de Gulliver. La science-fiction s’est intéressée au sujet dès 1920 avec des héros miniaturisés pour visiter des civilisations miniatures dans The Girl in the Golden Atom de Ray Cumming (1920). The Greenwood Encyclopedia of Science Fiction and Fantasy[1] estime que la miniaturisation est la métaphore d’une humanité dépassée par un monde changeant trop rapidement. Les recherches de Pym dans Ant Man, apparu en 1962, demeurent largement utopiques, mais peuvent laisser fantasmer quelques scientifiques avides de découvertes révolutionnaires. Pym effectue notamment des recherches sur la physique subatomique. Il est certain qu’une telle technologie, imaginée pendant la Guerre froide, jouerait un rôle considérable dans les rapports de forces géopolitiques. Les fictions sur la miniaturisation du corps humain reflètent aussi la réalité technologique qui tend à réduire de plus en plus la taille des objets depuis les années 1950. La réduction de la taille des ordinateurs et des objets techniques et notamment de l’informatique dans les années 1960 alimenta les fantasmes sur la réduction de la matière grâce à la technologie. C’est ce qui généra les nombreuses fictions sur la miniaturisation du corps humain, qui connut un essor spécifique dans les années 2010 avec l’avènement des nanotechnologies, source de multiples fantasmes sur un monde miniature susceptible de révolutionner la condition humaine. Si la Seconde révolution industrielle a entamé la réduction de la taille des objets techniques, permettant un progrès économique et social indéniable via la société de consommation, la révolution numérique accéléra encore ce processus, au point d’envisager la miniaturisation des humains au rang d’êtres purement numériques, des individus capables de pénétrer dans le cyberespace sous la forme d’être dématérialisés. Le rayon de miniaturisation est souvent utilisé pour réduire la taille des humains dans les œuvres de science-fiction. Cette technologie trouve son origine dans la foudre lancée par les dieux dans les mythologies. On trouve un prototype de générateur atomique dans le film d’horreur Dr Cyclops (1940), le héros éponyme réduisant ses victimes grâce à sa technologie démoniaque.
Ant-Man s’inscrit donc la continuité de nombreuses fictions décrivant la réduction du corps humain. Si cette mythologie est de plus en plus populaire, elle ne repose sur aucune découverte réelle. Il n’en reste pas moins qu’elle génère de nombreux fantasmes. Les militaires imaginent notamment des soldats microscopiques et les politiques une gestion plus durable de l’humanité si celle-ci était réduite à une taille moins importante.
[1] Westfahl Gary, The Greenwood Encyclopedia of Science Fiction and Fantasy : Themes, Works, and Wonders, Volume 2, Greenwwood Publishing Group, 2005, p. 528
Thomas Michaud